La Banque du miel
Projet artistique né en 2009 en France, puis en essaimage en Europe, la Banque du miel pose l’abeille comme un nouvel indicateur de richesses des territoires. Depuis des installations dans l’espace public, elle développe et assure ce qu’elle appelle un « Service public de Pollinisation ». Elle collecte et redistribue le « butin », et transforme notamment l’argent mort des humains en abeilles vivantes.
Avec ce projet de recherche appliquée, intitulé la Banque du miel, l’association franchit aujourd’hui une nouvelle étape de développement, qui se caractérise notamment par le lancement d’une vaste mission de pollinisation et d’essaimage. Par le biais d’installations artistiques dans l’espace public, la Banque du miel sensibilise le grand public à la lecture et à la compréhension des pressions que l’homme opère sur les milieux qu’il habite. La pertinence des problématiques soulevées par ce projet est mise en évidence par l’actualité de deux crises, l’une écologique (dégradation des écosystèmes, diminution des populations d’abeilles…), l’autre économique et sociale (crise financière).
Le projet de la Banque du miel a connu deux prologues en 2008, en septembre avec « les Chambres fortes » réalisées dans le cadre de la biennale départementale d’art contemporain « Art Grandeur Nature » en Seine-Saint-Denis et l’installation d’un dispositif « un bien pour un mal » à la galerie OFFOFF à Lyon, en décembre 2008.
Ce projet décline depuis 2009, une mission « transhumante » aux échelles métropolitaines, entre acteurs culturels, urbains et scientifiques, autour de questions ouvertes portant sur l’évolution, la nature, la densité et l’intensité de la ville (zones urbaines et péri-urbaines).
La banque du miel, un dispositif de recherche pour protéger les abeilles et les hommes de la folie spéculative.
L’homme est étroitement dépendant de l’abeille, qui loin de se contenter de produire du miel, contribue pleinement au « service de pollinisation », sans lequel nombre d’espèces végétales verraient leur reproduction compromise. Ajoutons au passage que d’après une étude menée par des chercheurs français et allemands, dont les résultats sont publiés dans la revue « ECOLOGICAL ECONOMICS », l’activité pollinisatrice des insectes dans le monde est estimée à 153 milliards d’euros par an, somme qui représente 9,5% de la valeur de l’ensemble de la production alimentaire mondiale.
Les abeilles et leur miel constituent également un excellent indicateur du niveau de biodiversité des écosystèmes qu’elles butinent. La situation que l’apiculture nous révèle peut sembler paradoxale : alors que l’abeille est en voie de disparition dans certaines régions rurales de France situées à proximité de zones d’agriculture intensive, elle s’adapte incroyablement bien en ville, où les ruches peuvent produire jusqu’à 3 à 4 fois plus de miel que dans certaines campagnes. Ce constat est la preuve d’un dérèglement des milieux et remet en question notre mode de production agricole et d’aménagement du territoire. Aussi, ce nouvel “indicateur ruche” enseigne et renseigne la nature de la ville et nous alarme sur le genre humain et le genre urbain.
L'abeille comme nouvel indicateur de richesse.
Olivier Darné
Concentration d’histoires et de géographies, accumulation d’anecdotes de butinages, le miel rend perceptible l’invisible de la ville. Il condense du temps et des espaces urbains, résultat d’une diversité végétale, animale et humaine au sein d’un territoire « si commun » à tous qu’il se donne à manger. Il devient le butin commun à partager, la monnaie d’échange. Aussi, passant du butinage au butin, l’abeille devenue nouvel indicateur de richesse rend visible les flux monétaires dématérialisés qui régissent désormais l’économie mondiale.
D’autre part, le niveau de production de miel et le taux de mortalité des abeilles nous donnent des indications sur le degré de richesse ou de pauvreté des espaces butinables. Ces indications nous permettent de lire en plein (miel) ou en creux (disparition des abeilles) la densité, l’intensité et la diversité des ressources sauvages de n’importe quel écosystème.
Au-delà de la production de miel, c’est le « service de pollinisation » lui-même qui constitue la plus-value réelle créée par la présence d’une ruche. Il devient alors nécessaire de créer de la pollinisation là où il n’y en a pas et ce par l’intermédiaire de la Banque du miel, qui permettrait de multiplier des unités de production transhumantes.
Plutôt qu’une économie de la mort c’est bien une «révolution du vivant» qui est engagée.